Page 25 - Une Famille Volante
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dans l’eau profonde de 1,50 m à cet endroit, à le faire remonter à la surface et à le ramener sur

        la berge au moyen de perches recourbées à leurs extrémités, qu’ils manœuvrent à bord de leurs
        deux pirogues. Lorsque la bête est à terre, malgré ses blessures mortelles, elle ouvre son énorme
        gueule découvrant sa formidable mâchoire qu’ils parviennent à lui faire refermer avec des perches
        posées à plat sur le museau. Les rabatteurs se mettent ensuite à l’ouvrage pour séparer la tête et
        la queue du tronc avec leurs machettes, la queue étant, paraît-il, le morceau de choix.

        Les carabines resteront ensuite inoffensives devant des quantités d’antilopes et de canards. Le
        plus pénible de cette journée de détente, ce sont les moustiques qui, par légions, harcèlent de
        leurs douloureuses piqûres nos valeureux aviateurs-chasseurs.
        Le lendemain 26, après une nuit sous moustiquaires, ils quittent Fort-Lamy à 7 h 10, après avoir
        pris 250 litres de carburant. Mais, quarante minutes plus tard, ils sont contraints de se poser
        sur un terrain de secours à Mai-Aiché, inquiétés par les cliquetis du moteur. Picard le mécano
        détecte un problème de culbuteur et répare en 10 minutes une butée de réglage de soupapes.
        Redécollage direction Abécher, la piste est très aisée à suivre et il existe des terrains de secours

        assez nombreux : Bokoro, Yao Ati, El-Krenek, Houm-Hadjer.  En plus de ces terrains, dans les
        régions où la brousse est plus dense, la piste a été élargie de 100 mètres à certains endroits, sur
        une longueur de 1000 mètres, ce qui permettrait de s’y poser en cas de panne. Abécher est atteinte
        à 12 h 45, atterrissage mouvementé, car aux heures chaudes. Ils y passent la nuit, accueillis par
        le commandant militaire qui leur offre deux petites autruches !

        Le 27 janvier, nouveau plein de 300 litres, merci Shell. À 7 heures, fidèles au programme, envol
        pour El-Facher, au Soudan Egyptien. Il faut faire très attention à ne pas quitter la piste des yeux,
        il y a beaucoup d’oueds, la région est très montagneuse sur la plus grosse partie du trajet, l’avion
        est très secoué. Quatre heures 15 plus tard, le Farman se pose à El-Facher, le terrain est bon. Ils
        reçoivent un accueil chaleureux du gouverneur anglais et chargent à nouveau 250 litres de car-
        burant. Ils en repartent à 13 h 15, le trajet est facile, sauf à El-Mahud, ville d’où partent plusieurs
        pistes.  Il faut donc bien repérer celle qui mène à El-Obeid, où ils atterrissent à 17 h 10, sur un
        terrain un peu petit mais très bon, après plus de 8 heures de vol dans la journée !

        28 janvier : Départ à 7 h 45, la navigation devient très facile, en suivant la voie ferrée qui conduit
        jusqu’au Nil blanc, que l’on suit ensuite jusqu’à Khartoum. La ville est superbe et le panorama
        saisissant de beauté, à la jonction du Nil bleu et du Nil blanc. Atterrissage à 11 h 30 sur un terrain
        très grand, mais sablonneux et ondulé.
        À regret, ils quittent Khartoum le lendemain 29 janvier à 7 h 20, suivant le Nil en survolant Ber-

        ber puis Abou-Hamed où l’on abandonne le fleuve pour longer la voie ferrée qui traverse une
        partie du désert de Nubie.  Mais 100 km avant Ouadi-Halfa (Wadi Halfa), ils tombent en panne
        d’essence et doivent se poser en plein désert, au lieu-dit Station 3. Ils avaient pourtant chargé
        180 litres d’essence à l’escale de Khartoum, mais le Farman avait dû lutter contre des vents do-
        minants orientés nord-sud et il faut grimper au-dessus de 1 500 mètres pour que la vitesse du vent
        soit moins forte. Des Indigènes sortis de nulle part s’attroupent rapidement autour de l’avion. Ils
        vont alerter le village voisin. L’équipage  doit organiser un bivouac de fortune en attendant un
        ravitaillement bienvenu de 100 litres d’essence au milieu de la nuit.

        Ce dépannage miracle en plein désert leur permet de décoller le 30 janvier aux aurores, à 6 h 40,
        pour atteindre quarante minutes plus tard leur objectif de la veille Ouadi-Halfa. Échaudés par
        cette expérience, ils prennent 522 litres de carburant, pour Le Caire. Étant ainsi fort chargés, ils ne
        tardent pas à décoller à 7 h 55, avant les heures chaudes. Un magnifique décor de verdure s’offre
        aux trois aviateurs, de chaque côté des rives du Nil. Tout est vert, le moindre espace est cultivé, ce

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