Page 33 - Une Famille Volante

Grand tour d’Afrique en 40 jours

Après leur périple de 17 000 kilomètres en Farman 190 à travers le nord de l’Afrique au début
de cette année 1933, les deux frères Jacques et Marcel Germain, cette fois accompagnés de leur
père Jean, détenteur lui-même de sa licence de pilote, ainsi que de leur ami le docteur Louis Al-
cay, entreprennent un grand tour de l’Afrique, par Le Caire et Le Cap. Ce nouveau voyage a été

longuement et sérieusement préparé.
Le conseil de famille a décidé que Jean-Baptiste, le plus jeune des trois frères, ne serait pas du
voyage, bien qu’il soit lui aussi pilote. En effet, vu les risques non négligeables d’une telle aven-
ture, il fallait désigner un volontaire, d’une part pour expédier les affaires courantes de la famille
à Alger et dans la Mitidja, et d’autre part, en cas d’accident fatal, pour assurer la continuité de la
gestion de leurs domaines créés et développés par les générations précédentes, avec les épreuves

et l’acharnement que l’on connaît.
L’avion choisi cette fois est le De Havilland DH 84 Dragon G-ACIW, avec son immatriculation
anglaise (il ne sera immatriculé F-ANGE qu’en septembre 1934) équipé de deux moteurs Gipsy
Major de 130 ch chacun. Cet appareil biplan à voilure haubanée dispose de six places et son rayon
d’action est de 1 400 kilomètres. Georges Descamps avait été fin juillet à Londres chercher cet
avion commandé par Jacques Germain dans sa version Prince de Galles ! Puis amené à Alger le
6 août 1933 en 5 h 15, Jacques étant parti de Perpignan le matin, via Alicante et Ténès jusqu’à

Maison-Blanche, avec comme passagers son père Jean et son jeune frère Jean-Baptiste.
Le jour J, 16 décembre 1933, toute la famille accompagne l’équipage à Maison-Blanche. La
météo est bonne. À 12 h 50, le Dragon décolle, lourdement chargé, avec ses quatre passagers, le
ravitaillement en vivres et eau, l’outillage et des pièces de rechange au cas où…

Cette première étape de mise en jambes est assez courte puisqu’après 1 h 40 de vol ils se posent à
Biskra. Là, ils font le plein de carburant, passent la nuit et repartent tôt le lendemain pour Gabès
(Tunisie) et Tripoli (actuelle Libye) où ils arrivent à 11 h 10.
Le 18, ils visent Tobruk qu’ils atteignent en trois étapes : Tripoli-Sirte en 2 heures de vol, puis
Sirte-Benghasi en 2 heures 45, et enfin Benghasi-Tobruk en 2 heures 5. Ils ont survolé les po-
pulations tribales de Tripolitaine, puis de Cyrénaïque, durant près de sept heures de vol dans la

journée. Il faut ménager le père Germain.
Le 19 décembre, après 4 heures 25 de vol sans problème depuis Tobrouk, les voilà déjà passés en
Égypte et rendus au Caire. Là, avant de changer de cap à 90 degrés, leur trajectoire virant d’ouest-
est à nord-sud, ils ont prévu de faire réviser leur Dragon anglais dans les ateliers De Havilland.
Ils profitent de ces trois jours pour faire un peu de tourisme, visitent la ville et s’aventurent même

jusqu’à Alexandrie distante de plus de 200 kilomètres au nord.
L’avion étant révisé, ils quittent Le Caire le 23 décembre très tôt à 2 h 35 du matin ! La chaleur
nécessite de partir tôt pour la plupart des étapes, car le décollage à pleine charge n’est souvent
possible qu’avant le lever du soleil. Ensuite, il est difficile de gagner de l’altitude à cause de la
faible densité de l’air aux heures les plus chaudes de la journée.

Mais deux heures plus tard, ils doivent se poser à Assiut pour réparer une fuite d’huile sur un des
moteurs. Les mécanos du Caire avaient sans doute mal resserré une durite ? Heureusement le
manomètre de pression d’huile a alerté le pilote. L’avion est immobilisé pour la journée. C’était
bien la peine de se lever tôt…

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